Chronique : La musique tchadienne meurt dans le silence parce qu’elle n’a jamais été considérée comme un véritable levier de développement

La musique tchadienne, autrefois vibrante et chargée d’âme, s’éteint lentement dans un silence aussi pesant qu’inquiétant. Il s’agit d’une ‘’agonie culturelle’’, de l’art livré à lui-même et surtout oublié par les pouvoirs publics, et délaissé par un public qui se tourne vers l’extérieur.

Jadis, la musique tchadienne se passionnait comme un miroir du peuple tchadien : elle racontait ses luttes, ses espoirs, sa joie de vivre. Des pionniers comme le groupe Matania, les icones comme Talino Manu, Sultan ou encore les groupes traditionnels des régions du Logone, du Guéra ou du Mayo-Kebbi ont façonné des sonorités uniques, portées par la fierté d’une identité culturelle forte. Aujourd’hui, cette richesse peine à se faire entendre. La vérité est simple : l’environnement politique tchadien enterre la musique.

En effet, la culture, en général, n’a jamais été considérée comme un véritable levier de développement que ce soit dans le cinéma ou de la musique. Elle reste reléguée au second plan, sans politique claire, sans stratégie nationale de valorisation, et sans mécanismes durables de financement. Les rares projets soutenus le sont souvent pour des raisons d’image ou d’opportunisme politique, plutôt que par conviction artistique. Résultat : les artistes s’autocensurent, les créations perdent de leur profondeur, et l’art devient tiède, privé de souffle et d’audace. Mais tout ne vient pas que de la chose politique. Le show-buzz tchadien souffre d’un mal interne : l’amateurisme généralisé. Les managers, pour la plupart autodidactes, manquent de formation et de vision. Ils sont tellement affamés qu’ils ne pensent qu’à s’enrichir grâce aux œuvres de l’esprit des artistes. Pareille pour les studios de production qui ne respectent pas toujours les standards professionnels. On enregistre un son, on le publie sur Facebook, on obtient quelques likes… et c’est tout. Aucun suivi, aucune planification, aucun développement d’image ou de marque artistique.

En réalité, les jeunes artistes tchadiens portent des grands rêves, mais trop souvent, ils finissent par abandonner, après un ou deux singles, faute de moyens et de reconnaissance. Certains sombrent dans la frustration, d’autres s’expatrient ou changent de voie. C’est dans ce chaos, les musiques étrangères envahissent nos ondes, nos soirées et nos écrans.
Les sons venus du Nigeria, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun, du Congo ou du Ghana dominent, pendant que les artistes tchadiens restent confinés à la marge.
La musique tchadienne meurt parce que personne ne l’écoute plus. Elle meurt dans l’indifférence, dans le désordre, dans le manque de respect de la profession.

Focus Media

par TROPICAL

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