TROPICAL INFO

L’annonce est tombée nette ce jeudi matin comme un couperet. Un coup dur pour le secteur informel. Le gouvernement a une fois de plus asphyxié le secteur informel. Avec cette augmentation excessivement, des prix des carburants, les petites et moyennes entreprises vont-elles survivre ?

Les nouveaux tarifs par litres à la pompe rendus publics ce jeudi, 15 février 2024:
super (Essence) : 730 FCFA au lieu de 518 FCFA (soit 212 FCFA de plus) ;
gasoil : 828 FCFA au lieu de 700 FCFA (soit 128 FCFA de plus) ;
jet A1 : 580 FCFA au lieu de 550 FCFA (soit 30 FCFA de plus). seul le prix du pétrole lampant (392 FCFA) reste sans changement.

La nouvelle a autant surpris et outré les Tchadiens que les explications peu claires et moins rassurantes du ministre de Commerce, Abdelkerim Ahmat, qui parle d’un banal « réajustement des prix ». Et reconnaît que son département a autorisé l’importation des produits étrangers pour faire face à ce qu’il qualifie de « situation difficile ». Le tout comme si le Tchad n’était pas un pays pétrolier et qu’il ne disposait d’aucune raffinerie.

Si le gouvernement dit chercher ainsi à contrer la fraude, qui est, selon lui, la cause de la pénurie répétitive des carburants, Brahim Guihini Dadi, président directeur général de la compagnie aérienne Royal airways, n’y comprend rien et s’interroge : « Pour contrer la fraude. Pourquoi le jet A1 ? », a-t-il écrit sur sa page Facebook. Et il n’est pas seul à se poser mille et une question autour de cette surprenante affaire d’augmentation des prix des carburants.

Autre argument que les officiels tchadiens utilisent pour justifier la hausse du coût des carburants : le Tchad pratique les prix les plus bas, comparé au Cameroun et autres pays voisins ou de la sous-région. Mais ce qu’ils ne disent pas ou oublient, le coût de vie et les prix des transports sont deux ou trois fois plus chers au Tchad que dans ces mêmes pays qui servent de comparaison. De façon globale, quelles en sont les conséquences pour les ménages et les commerces, pour ne pas dire l’économie, puisqu’il n’y en a pas ? Quelles leçons en tirer ?

La première conséquence certaine et redoutable est l’explosion du coût de vie, qui sera à jamais plus insupportable pour la population tchadienne, classée l’une des plus pauvres du monde.

L’arrêté fixant les nouveaux prix est entré en vigueur depuis hier. Il dit que « les prix (des carburants, ndlr) dans les localités du pays sont ceux les prix à la pompe à N’Djaména, majorés des frais de transport en valeur absolue. » Il faut donc s’attendre à l’augmentation immédiate, si ce n’est pas déjà fait, des prix des transports qui vont doubler, voire tripler sur l’ensemble du territoire.

Déjà, avec le mauvais état des routes nationales et la pénurie persistante des carburants, les prix des transports urbains, interurbains et ruraux (par bus, taxi et mototaxi) ont connu une hausse considérable ces dernières années sans que le gouvernement ne soit capable de faire quoi que ce soit. Avec les nouveaux prix, les Tchadiens vont devoir débourser et même vider, avec un pincement aux cœurs, leurs économies pour pouvoir se rendre au travail, à l’école et au marché et voyager dans d’autres villes ou dans leurs villages.

L’augmentation des prix des transports va sans nul doute entrainer l’augmentation des prix des denrées alimentaires et autres produits de consommation. Alors que, en raison des diverses conjonctures (mauvaise pluviométrie, mauvaise récolte, flambée mondiale des prix de certaines denrées, etc.), les prix des denrées des premières nécessités ont flambé sur les marchés locaux en 2023. Au point que le gouvernement a récemment fait des exonérations sur les produits vivriers pour soulager les consommateurs. Mais l’augmentation inattendue des prix des carburants ce 15 février 2024, un véritable coup de massue sur la tête des consommateurs, vient tout remettre en cause et va davantage faire voler les prix. Si des mesures d’accompagnement ou alternatives ne sont pas immédiates prises, beaucoup de personnes ne pourront plus trouver l’unique repas par jour et périront de famine les mois à venir.

La chute des affaires est également attendue. Le manque d’énergie, la cherté et la pénurie des carburants cumulés vont précipiter, à coup sûr, la mort des commerces. Puisqu’ils avaient recours au super ou au gasoil pour alimenter leurs générateurs, palliant ainsi l’incapacité de la SNE à fournir l’électricité partout et en permanence, l’augmentation des prix des carburants (qui risque de devenir définitif), la pénurie (qui risque de perdurer) et la canicule (qui revient chaque année) seront pour eux une sorte de coup de grâce.

Tout cela fait dire que les Tchadiens (qui ont le droit d’exprimer leur opposition aux nouveaux prix) ne doivent pas ou plus compter, ni sur le pétrole qui sort de leur sous-sol, ni sur la raffinerie de Djermaya pour couvrir leurs besoins en carburants. Année après année, il s’est avéré que la pénurie des carburants est devenue une fatalité pour le gouvernement, qui n’arrive ni à la juguler ni à convaincre les Tchadiens de ce qui est à l’origine.

Terminons cette analyse non exhaustive par quelques questions légitimes. Augmenter les prix était la seule solution qui restait au gouvernement pour contrer la fraude et la pénurie qui en est le corollaire ? Que fera le gouvernement de l’argent de plus et surtout beaucoup qu’il va collecter sur la vente des carburants, sachant que cet argent là n’est pas budgétisé ? Va-t-il dire ouvertement aux Tchadiens ce qu’il compte en faire et leur rendre compte de son utilisation ? Que pensent le Conseil national de transition et les conseillers nationaux de cette hausse soudaine, excessive et inédite des prix des carburants ? Les Tchadiens vont-ils contester ou accepter de subir ?

Avec La Voix

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